Anil


🇫🇷
Rencontre avec un jeune adolescent Indien intouchable livré à lui même dans la ville très religieuse de Varanasi en Inde.
Le soleil illumine progressivement les ghats alors qu’une foule compacte se presse pour les premières ablutions de la matinée. Varanasi, ville mythique berceau de l’hindouisme entretient une forte tradition brahmanique et chaque jour, ils sont des centaines à venir en pèlerinage. Outre les Hindouistes, la ville attire de nombreux occidentaux touchés par le charme de cette ville empreinte d’histoire. Profitant de la rivière sacrée, Anil commence sa journée en lavant son unique pantalon et sa chemise. Avec une roupie, il s’offre un tchaï et rejoint les petites rues alambiquées non loin des guest houses où résident la plupart des étrangers. « Namaste Mister… ». En tendant sa main d’intouchable, il se présente sous le nom de Miko à Tannas, ce Grec d’une trentaine d’années qui n’a pas la même réaction que certains Indiens avec l’adolescent. «L’Inde est terrible pour ces jeunes, et plus particulièrement à Varanasi qui est une ville très traditionnelle » explique –t-il en remarquant « la difficulté de la vie dans ce pays aux mille facettes ». Orphelin, et sans domicile fixe, Anil fait partie de ces millions d’enfants qui errent quotidiennement à la recherche des roupies nécessaires pour survivre. À l’âge de six ans, une crue du Gange va inonder le village natal d’Anil distant d’une centaine de kilomètres. Ces parents vont périr durant cette mousson exceptionnelle et des cambrioleurs vont s’attaquer à lui alors qu’il est seul dans sa maison. En fuyant, il monte dans un train qui le conduit jusqu’à Varanasi. À son arrivée, il va chercher des petits boulots qui rendent service aux commerçants et permettent à des enfants de gagner un petit salaire. Un jour, il rencontre une femme indienne qui lui propose de travailler à son service. Au fur et à mesure, cette personne le recueille et l’aide sur le plan matériel. Peu après, Anil va trouver une place d’homme à tout faire dans une pizzeria voisine. Pendant deux ans, il va travailler dans ce restaurant, puis les rapports dégénèrent avec son employeur qui le frappe et le maltraite. Dès lors, avec un peu d’argent en poche et comme de nombreux enfants des rues, il décide de prendre le train pour rejoindre les grandes villes que sont Calcutta, Bombay et Delhi. De retour à Varanasi en décembre 2001, Anil à quatorze ans et développe une véritable haine pour les employeurs Indiens qui l’ont trop humilié auparavant. Désormais, il se fait appeler Miko, comme la crème glacée symbole de l’occident ; et avec son faible anglais il accoste les touristes pour leur servir de guide car l’endroit et très propice pour les rabatteurs. À force de traîner ses baskets dans les ruelles de la vieille ville, Anil connaît de nombreuses guest houses et peut renseigner les étrangers dans de nombreux domaines. Les rapports avec les propriétaires qui sont le plus souvent des brahmanes apparaissent tendus qui voient d’un mauvais oeil cet enfant proche des occidentaux et en décalage avec la vie des autres Indiens. Les réflexions et les regards méprisants se perçoivent distinctement car son attitude et son apparence vestimentaire dénotent énormément avec les autres garçons de son âge. Provocateur par moments, son personnage est vu d’un mauvais œil et lui attire de nombreux ennuis. En proposant ses services, il se heurte aussi à des réactions négatives de la part de touristes qui sont régulièrement accostés par des rabatteurs en tout genre. Emmanuelle, une touriste Parisienne constate que la personnalité d’Anil n’est pas désagréable, qu’il sort un peu de l’ordinaire de par son comportement et que malgré sa situation, il dégage une certaine humilité. Agathe vient de passer une journée avec Anil, et avoue sa surprise de voir les attitudes dédaigneuses qui se dégagent à son passage. Armés de leur bâton les policiers sont extrêmement agressifs avec les mendiants et les enfants des rues. Il n’y a pas de place pour des enfants comme Anil dans la société Indienne. La perte de sa famille le prive d’une scolarisation mais aussi d’un enseignement familial. Le système des castes prévaut à un parcours directement hérité de sa famille, et comme son père, Anil devrait être bijoutier. Au contact des Occidentaux ce jeune Indien a découvert une autre pensée à travers les rencontres, ca qui fait de lui un écorché vif dans un système coutumier, hermétique face à un enfant sans repère d’éducation et attiré par l’occident. En vivant dans la rue, Anil a commencer à fumer le shilum sacré utilisé par les saddhus, ces ascètes nomades respectés à travers tout le pays. L’usage d’herbe ou de « charras » lui permet de calmer ses angoisses quotidiennes. Livré à une vie de débrouillardise et de survie, son attitude détonne des autres enfants qui comme lui vivent dans la misère et la solitude. Euphorique quand il fume, la personnalité extravertie d’Anil étonne, provoque des regards complices mais aussi des attitudes dédaigneuses. Avec philosophie, il arbore un sourire de joie de vivre qui masque à peine une histoire difficile lisible au fond de ses yeux noirs marqués par l’injustice. Cruelle destinée dans une société où l’on doit accepter son sort quel qu’il soit, question de karma !

 

🇬🇧
Meeting with a young untouchable Indian teenager delivered to him even in the very religious city of Varanasi in India.
The sun gradually illuminates the ghats while a compact crowd presses for the first ablutions of the morning. Varanasi, mythical cradle of Hinduism has a strong Brahmanic tradition and every day hundreds of pilgrims come on pilgrimage. In addition to Hinduists, the city attracts many Westerners affected by the charm of this city steeped in history. Taking advantage of the sacred river, Anil begins his day washing his only trousers and his shirt. With a rupee, he offers himself a chai and joins the small streets convoluted not far from the guest houses where most foreigners reside. "Namaste Mister ...". Stretching out his untouchable hand, he introduces himself under the name of Miko to Tannas, the thirty-year-old Greek who does not have the same reaction as some Indians with the teenager. "India is terrible for these young people, especially in Varanasi, which is a very traditional city," he says, noting "the difficulty of life in this country of many facets". Orphaned, and homeless, Anil is one of those millions of children who roam daily in search of the rupees needed to survive. At the age of six, a flood of the Ganges will flood the birthplace of Anil village a hundred kilometers away. These parents will die during this exceptional monsoon and burglars will attack him while he is alone in his home. While fleeing, he climbs on a train that leads him to Varanasi. When he arrives, he looks for odd jobs that help merchants and allow children to earn a small salary. One day, he meets an Indian woman who offers to work for him. As and when, this person collects and helps him materially. Shortly after, Anil will find a place of handyman in a nearby pizzeria. For two years, he goes to work in this restaurant, then reports degenerate with his employer who hits him and mistreats him. From then on, with a little money in his pocket and like many street children, he decided to take the train to the major cities of Calcutta, Mumbai and Delhi. Back in Varanasi in December 2001, Anil at the age of fourteen developed a real hatred for Indian employers who had humiliated him before. From now on, he calls himself Miko, like the ice cream symbol of the West; and with his weak English he accosted the tourists to serve as their guide because the place and very suitable for touts. By dragging his sneakers in the streets of the old town, Anil knows many guest houses and can inform foreigners in many areas. The relations with the owners who are most often Brahmins appear tense who see a bad eye this child close to Westerners and out of touch with the lives of other Indians. Reflections and contemptuous glances are distinctly perceptible because his attitude and his appearance of dress denote enormously with the other boys of his age. Provocative at times, his character is viewed with an evil eye and attracts him many troubles. By offering his services, he also comes up against negative reactions from tourists who are regularly accosted by touts of all kinds. Emmanuelle, a Parisian tourist, notes that Anil's personality is not unpleasant, that he comes out of the ordinary by his behavior and that despite his situation, he exudes a certain humility. Agathe has just spent a day with Anil, and admits his surprise to see the disdainful attitudes that emerge as he passes. Armed with their staff, the police are extremely aggressive with beggars and street children. There is no room for children like Anil in Indian society. The loss of his family deprives him of schooling but also of a family education. The caste system prevails on a course directly inherited from his family, and like his father, Anil should be a jeweler. In contact with Westerners this young Indian discovered another thought through the meetings, which makes him a skinned alive in a customary system, hermetic in front of a child without a benchmark of education and attracted by the West. While living in the street, Anil began to smoke the sacred shilum used by the saddhus, these nomadic ascetics respected throughout the country. The use of grass or "charras" allows him to calm his daily anxieties. Delivered to a life of resourcefulness and survival, his attitude detonates other children who like him live in poverty and loneliness. Euphoric when he smokes, the extroverted personality of Anil surprises, provokes complicit glances but also disdainful attitudes. With philosophy, he has a smile of joie de vivre that barely masks a difficult story readable in the depths of his black eyes marked by injustice. Cruel destiny in a society where one must accept his fate whatever it is, question of karma!